UJCML
Union de la Jeunesse Communiste
Marxiste-Léniniste
Front
uni résolu contre l'impérialisme américain
[Extrait
de Garde Rouge, mensuel de l'Union des jeunesses communistes
(marxiste-léniniste), n° 3, janvier 1967. Ce texte
est publié en même temps que la formation des Comités
Vietnam de Base, qui auront un succès énorme et
seront l'ossature initiale du futur mouvement maoïste]
" Le parti communiste chinois et le gouvernement chinois
brandissent toujours plus haut le drapeau de la lutte contre
les impérialistes ayant les Etats-Unis en tête,
soutiennent entièrement la lutte révolutionnaire
de toutes les nations opprimées et défendent la
paix mondiale. "
(Discours de Nguyen Minh Phuong,
chef par intérim de la mission permanente du F.N.L. à
Pékin, le 19 décembre 1966, à l'occasion
du XXIIe Anniversaire de la formation de l'A.P.L. et du VIe Anniversaire
de la constitution du F.N.L.)
" Bien que l'aide matérielle
au peuple vietnamien soit importante, c'est la pensée
de Mao Tsé-toung qui est, pour nous, le trésor
inestimable. "
(Discours de Tran Tu Binh, ambassadeur
de la R.D.V. en Chine, le 19 décembre 1966).
Les camarades vietnamiens sont bien placés pour savoir
quelle est la nature de l'impérialisme américain.
Leurs déclarations rapportées
ci-dessus soulignent avec force les deux principes suivants :
1° Le seul moyen de défendre
la paix mondiale est le soutien résolu de la lutte des
peuples opprimés contre l'impérialisme américain,
fauteur de guerre par nature.
2° Le soutien le plus important
est le soutien politique conséquent fondé sur le
marxisme-léninisme.
Il s'ensuit que l'action unie contre
les agresseurs U.S. n'est possible qu'avec ceux qui le dénoncent
comme l'ennemi principal et le combattent résolument.
Elle est impossible avec ceux qui
cherchent à s'entendre avec lui aux dépens des
peuples révolutionnaires du monde, et qui manigancent
un Munich vietnamien.
Depuis deux ans, les dirigeants
du P.C.U.S. réclament l'unité d'action pour aider
le Vietnam.
Certes, l'unité est une bonne
chose, mais, avant de s'unir avec quelqu'un, il faut savoir s'il
s'agit d'un ami ou d'un ennemi, si ses buts sont en accord ou
en contradiction avec ceux que l'on veut atteindre.
A cette fin, nous examinerons successivement
:
a) Les contradictions du monde contemporain
et la conception juste du front uni contre l'impérialisme
américain.
b) L'idéologie propagée
par les dirigeants soviétiques et leur politique face
à l'agression américaine au Vietnam.
Les quatre contradictions
Elles opposent :
1° Le camp socialiste au camp
impérialiste ;
2° le prolétariat à la bourgeoisie ;
3° les nations opprimées à l'impérialisme
;
4° les pays impérialistes et les groupes monopolistes
entre eux.
Ces quatre contradictions sont un
" invariant de toute la période de la crise générale
du capitalisme qui s'est ouverte avec la révolution d'Octobre
et se poursuivra jusqu'au triomphe mondial du socialisme.
Elles constituent un système
lié, chacune d'entre elles étant présente
dans toutes les autres.
En voici deux exemples :
a) la contradiction entre les deux
camps se manifeste à travers les trois
autres contradictions ;
b) les luttes de libération nationale font partie intégrante
de la révolu
tion socialiste mondiale.
Leur caractère et leur développement
sont affectés
1° par le soutien du camp socialiste,
et la peur des impérialistes de voir ce camp renforcé
;
2° par le soutien des prolétariats
des pays capitalistes
avancés ;
3° par les contradictions inter-impérialistes
qui favorisent ces luttes.
Le caractère lié du
système des quatre contradictions fondamentales explique
qu'elles puissent converger.
Actuellement, elles convergent en
Asie, en Afrique et en Amérique latine, dans les pays
dominés par l'impérialisme, "maillon le plus
faible " de sa chaîne, et " zone des tempêtes
" du monde.
Autrement dit, la troisième
contradiction est celle qui est actuellement la plus explosive.
Front uni anti-américain
Les peuples de ces régions se heurtent partout à
l'impérialisme américain, à ses acolytes,
à ses fantoches.
Il intervient partout pour réprimer
les luttes populaires en tant que gendarme international de la
" civilisation occidentale ".
En même temps, il tente d'imposer
son hégémonie aux autres pays impérialistes,
ce qui ne va pas sans susciter des résistances.
L'impérialisme U.S. se trouve
ainsi à l'un des pôles de chacune des quatre contradictions
fondamentales.
Il est possible et nécessaire
de l'isoler en réalisant un large front uni.
Celui-ci implique :
- le regroupement de toutes les
forces qui s'opposent résolument à l'impérialisme
américain.
- la dénonciation de la supercherie
que représentent les " négocia
tions de paix n proposées par Johnson, ou par ses garçons
de course britanniques et autres, ainsi que de toutes les tentatives
pour lui ménager une " porte de sortie " au
Vietnam grâce à un compromis sur le dos du peuple
vietnamien.
Il y a compromis et compromis
Qu'on nous comprenne bien, cela ne veut pas dire qu'il n'existe
pas de situations où un compromis soit nécessaire
avec l'ennemi ; mais ce sont toujours des compromis tactiques
; des trêves qui ne servent qu'à mieux préparer
ses forces pour l'attaque ultérieure.
Un tel compromis s'apparente à
une retraite stratégique. Le but de celle-ci, dit Mao,
" c'est de conserver les forces de l'armée et de
préparer la contre-offensive ".
Les compromis sans principes sont
ceux qui préparent, non la contre-offensive, mais un règlement
définitif avec l'ennemi ; c'est-à-dire la capitulation.
Pour des révolutionnaires,
renoncer à la révolution, n'est-ce pas capituler
?
C'est cela, et même plus,
car il n'y a pas de troisième voie.
On est révolutionnaire ou
contre-révolutionnaire.
Celui qui veut faire sa paix avec
l'impérialisme est sur le point de passer avec armes et
bagages de son côté.
Ce que promet la coexistence...
La dégénérescence des dirigeants du P.C.U.S
illustre ce processus.
Depuis le vingtième congrès
(février 56), Khrouchtchev, ses successeurs et ses partisans
de par le monde, ont expliqué que le but de la politique
soviétique était de bannir de la vie sociale, dès
aujourd'hui et définitivement, toutes les guerres et pas
seulement la guerre atomique.
L'instauration d'une paix perpétuelle
est nécessaire, puisque "l'étincelle d'une
guerre locale peut mettre le feu au monde " et détruire
l'humanité.
Elle est d'autre part possible avant
le triomphe mondial du socialisme et la disparition des antagonismes
de classes, notamment grâce à la présence
d'hommes d'Etat "raisonnables " à la tête
du principal pays impérialiste (le président Eisenhower
" se soucie autant que nous d'assurer la paix ", disait
Khrouchtchev).
Les guerres civiles étant
aussi des guerres, ce noble idéal de paix se réalisera
d'autant plus facilement que les communistes éviteront
d'avoir recours à la violence.
Celle-ci n'est plus nécessaire,
car il leur est désormais possible de a conquérir
une solide majorité parlementaire " et de s'en servir
pour effectuer pacifiquement le passage au socialisme.
" La mission historique du
prolétariat est de défendre la paix " et "
la coexistence pacifique est la forme supérieure de la
lutte des classes ".
Cette conception de la coexistence
pacifique aurait déjà fait la preuve de son efficacité.
Le théoricien soviétique
G. Strarouchenko, par exemple, écrivait :
" A présent la politique de coexistence pacifique
[...] paralyse l'agression contre-révolutionnaire de l'impérialisme
sur toute la terre (sic), favorisant la montée du mouvement
révolutionnaire de libération nationale. "
(La Vie internationale, octobre 1963.)
... Ce qu'elle accomplit
Aujourd'hui, avec les exemples du Vietnam, du Laos, du Congo,
du Gabon et de Saint-Domingue, cette image idyllique des relations
internationales ne semble guère convaincante.
Ce ne sont pas là, d'ailleurs, des échecs contingents
de cette politique de " coexistence pacifique ", mais
son résultat direct.
Les dirigeants soviétiques
pourraient faire leur la devise de Guillaume le Taciturne : "
II n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre,
ni de réussir pour persévérer. "
Que " l'esprit de camp David
" ait été suivi de l'incident de l'U-2, que
la rencontre de Vienne n'ait pas empêché le blocus
de Cuba, que le traité de Moscou ait conduit à
l'agression au Vietnam du Nord, tout cela n'a pas dissipé
leurs illusions concernant la possibilité de s'entendre
avec les impérialistes.
Se font-ils d'ailleurs des illusions ?
Partagent-ils celles que leur propagande
répand tous les jours dans les masses ? (Notamment sur
la possibilité d'imposer aux impérialistes un désarmement
général et complet ?)
Ou bien n'est-ce là qu'un écran de fumée
derrière lequel ils poursuivent leur grand dessein qui
est le rapprochement avec les Etats-Unis sur le dos des peuples
du monde entier ?
Etant donné le principe selon
lequel les pays socialistes n'exportent pas la révolution,
la coexistence pacifique telle que l'entendent les marxistes-léninistes
(maintien du système des quatre contradictions fondamentales,
non-franchissement des frontières par des armées)
peut être imposée par le rapport des forces.
Par contre, la " coexistence
pacifique " khrouchtché-vienne (fin de la guerre
froide, coopération et amitié avec les impérialistes)
suppose l'accord de l'adversaire.
Voyant Khrouchtchev quémander
leur amitié, les impérialistes lui ont posé
leurs conditions.
Le président Johnson les
a formulées dans son message du 21 janvier 1964 à
la conférence de Genève :
Nous sommes prêts, dit-il
" à examiner les moyens qui proscriront la menace
ou l'usage de la force, directs ou indirects, que ce soit par
agression, subversion, ou fournitures d'armes clandestines, pour
modifier des frontières ou ^ des lignes de démarcation,
pour gêner l'accès à un territoire ; pour
étendre le contrôle ou l'administration sur un territoire
en remplaçant les autorités établies ".
Ainsi le président Johnson
demande au gouvernement soviétique de coopérer
avec lui pour proscrire la menace contre les autorités
établies.
" C'est là le véritable
problème de fond ", commentait Le Monde.
Partage du monde
Depuis toujours, les réactionnaires ont redouté
beaucoup plus la " subversion " et l'" agression
indirecte " qu'une guerre de conquête déclenchée
par l'U.R.S.S.
S'ils ont claironné qu'elle
était une puissance agressive qui aspirait à conquérir
le monde, c'était la traduction dans leur langage du fait
que l'U.R.S.S. soutenait les luttes révolutionnaires des
peuples.
Il faut croire qu'aujourd'hui ils
n'ont plus aucune inquiétude à ce sujet. Lorsque
à son retour de Moscou, en 1964, la délégation
de la S.F.I.O. déclare qu'elle reconnaît la volonté
de paix de l'U.R.S.S., on est en droit de se demander qui s'est
converti aux conceptions de l'autre.
On est fixé sur cette question
en lisant les déclarations enthousiastes de l'ex-chancelier
Adenauer, à la suite de l'accord de Tachkent, saluant
en TU.R.S.S. un champion de la paix.
Le mot " paix " peut-il
avoir le même sens dans la bouche des révolutionnaires
et dans celle du plus réactionnaire des réactionnaires
allemands ?
Peut-on faire l'unité d'action
avec ceux qui ont maintes fois proclamé leur volonté
de s'entendre et de s'unir avec les impérialistes américains
pour le partage du monde ?
Voici ce que déclarait Gromyko
le 13 décembre 1962 (lendemain de la crise des Caraïbes)
:
" Nous sommes les pays les plus puissants du monde. Si nous
nous unissons dans l'intérêt de la paix, il n'y
aura pas de guerre. Et si un fou s'avisait alors de déclencher
la guerre, il nous suffirait de le menacer du doigt pour qu'il
se calme. "
" Si un accord est conclu entre
le chef du gouvernement soviétique, Nikita Serguéiévitch
Khrouchtchev et le président des Etats-Unis, John Kennedy,
il sera trouvé une solution aux problèmes internationaux
dont dépend le sort de l'humanité. "
C étaient là de douces
illusions, car les peuples du monde n'ont pas accepté
et n'accepteront jamais que leur sort soit décidé
par deux hommes cl Etat.
Le développement impétueux
de la lutte du peuple vietnamien a quelque peu troublé
les projets des khrouchtchéviens.
Les impérialistes préparent l'escalade
Vers la fin de 1963, les Américains
commençaient à envisager l'extension de la guerre
au Vietnam du Nord pour tenter, par une sorte de fuite en avant,
de terminer un conflit où ils sentaient qu'ils s'enlisaient
irrémédiablement.
En passant de la guerre spéciale
à la guerre classique, ils espéraient que la supériorité
en armes leur donnerait la victoire.
Le 9 juin 1964, grâce à
une fuite dirigée du Pentagone, le New York Times annonçait
que l'état-major américain avait conseillé
au gouvernement le bombardement d'objectifs situés au
Nord.
Le but de cette annonce et de toute
la campagne de déclarations officielles et officieuses
dans laquelle elle prenait place était de sonder les intentions
de l'U.R.S.S. tout en exerçant un chantage sur Hanoï.
Face à une menace aussi précise,
l'Union soviétique avait un moyen infaillible de dissuader
les Américains de porter leur coup : déclarer solennellement
qu'il serait riposté à toute agression contre la
R.D.V., membre du camp socialiste, exactement comme s'il s'agissait
de l'U.R.S.S. elle-même, de montrer le sérieux de
cette mise en garde en renforçant la défense anti-aérienne
au Vietnam avec les engins les plus modernes, en envoyant aussi
les unités de la Flotte soviétique munies de fusées
devant le golfe du Tonkin.
Non seulement l'U.R.S.S. s'est soigneusement
abstenue de prendre ces mesures qui seules pouvaient préserver
la paix, mais elle laissait en outre entendre qu'elle se désintéressait
de ce qui se^passait en Asie du Sud-Est, en faisant savoir qu'elle
envisageait de se démettre de ses fonctions de coprésident
de la Conférence de Genève.
Déjà le 24 janvier
1962, le maréchal Malinovski déclarait que la puissance
militaire de l'Union soviétique protégeait "
les pays socialistes qui nous sont favorables ".
Ces déclarations et d'autres
analogues (cf. Pravda du 7 janvier 1963) ont été
interprétées par les experts du Pentagone dans
un sens restrictif.
Pour mettre les points sur les i,
Valérian Zorine publiait le 30 juin 1964 un article dans
les Izvestia, intitulé " Les Problèmes du
désarmement et les manuvres de Pékin "
dans lequel il affirmait que si la Chine cherche à se
constituer un armement nucléaire, c'est parce qu'elle
" vise des buts et poursuit des intérêts particuliers
que le camp socialiste ne peut pas soutenir de sa force militaire
".
Cet avertissement voilé tenait
compte de certains plans américains.
La revue The Minority of one (dont
le comité de rédaction comprend quatre prix Nobel)
a publié une enquête dans laquelle on lit :
" Le débat partiellement
public entre le gouvernement et l'armée des Etats-Unis
sur le point de savoir si une intervention armée au Nord-Vietnam
affaiblirait la pression ennemie contre les forces engagées
au Sud ne sert qu'à camoufler une discussion bien plus
secrète sur l'opportunité de se lancer dans une
guerre bien plus totale contre la République populaire
de Chine. "
Ainsi dans le conflit qui approchait,
l'U.R.S.S. dénonçait d'avance la Chine comme étant
responsable, et déclarait qu'elle se tiendrait à
l'écart.
Répondant le 8 juillet à
une note de Hanoï du 25 juin, le gouvernement soviétique
se taisait concernant l'aide qu'il pourrait fournir en cas d'agression
américaine contre le Nord-Vietnam.
Les dirigeants de Washington interprétèrent
l'ensemble de ces faits comme signifiant qu'ils avaient le feu
vert pour une telle entreprise.
La suite des événements
allait leur donner raison.
N'allez pas trop loin l
A la suite d'un incident inventé de toutes pièces
par les Américains, ceux-ci bombardèrent cinq villes
du Nord-Vietnam, le 4 août 1964. Comment l'U.R.S.S. a-t-elle
réagi? C'est très simple... elle n'a pas réagi.
Certes les Izvestia publièrent le 6 août un article
sous le titre ; " N'allez pas trop loin ! "
Une façon comme une autre
de dire que les Américains n'étaient pas allés
trop loin.
Position logique d'ailleurs puisque
le journal admettait implicitement la véracité
du prétexte invoqué par les Etats-Unis, leur objectant
seulement qu'on ne saurait parler de légitime défense
" à des milliers de kilomètres du territoire
américain ".
Le correspondant de l'agence Chine
Nouvelle s'attachait au contraire à montrer toutes les
invraisemblances, les contradictions et les absurdités
contenues dans la version américaine que les organes relativement
sérieux de la presse occidentale commentaient d'ailleurs
avec autant de scepticisme.
L'agence Tass, elle, déclarait
seulement : " Les milieux soviétiques autorisés
condamnent résolument les actions agressives des Etats-Unis
dans le golfe du Tonkin qui conduisent à une aggravation
dangereuse d'une situation déjà tendue, n Bref,
l'U.R.S.S. ne reprochait aux Etats-Unis que des " actes
" et des " démarches inconsidérées
ou provocatrices " (L'Humanité, août 1964)
qui accroissent la "tension ".
La presse réactionnaire ne
s'y est pas trompée ; France-Soir du 11 août par
exemple, déclarait dans un article intitulé "
Russes et Américains, le même but " :
" Selon les Américains,
la Chine sait maintenant qu'elle ne peut compter sur la protection
des moyens nucléaires soviétique si elle s'engage
dans une aventure belliqueuse. Soviétiques et Américains
paraissent donc avoir pour le moment le même but : le rétablissement
de la paix dans le Sud-Est asiatique.
Ils s'entendent sur le dos de Pékin.
Il semble même que le président Johnson ait eu des
contacts à ce sujet avec Khrouchtchev pendant la crise.
"
Traité de Moscou
Au fait, Khrouchtchev a-t-il fait usage du télétype
rouge, quand il en était encore temps (Johnson a prononcé
un discours annonçant l'attaque plusieurs heures avant
que les bombardiers ne décollent), ou bien a-t-il estimé
que le bombardement d'un pays socialiste n'était pas un
acte susceptible de mettre en danger la paix mondiale ?..
Au cas où les deux compères
se sont parlé, il est d'ailleurs probable qu'ils ont surtout
échangé des félicitations à l'occasion
du premier anniversaire du traité de Moscou, "grand
pas vers la détente et le désarmement général
complet " qu'on fêtait justement en grande pompe en
U.R.S.S.
Les impérialistes s'enhardissent
Voyant que, conformément à leurs prévisions,
et contrairement à ses assurances, l'U.R.S.S. ne réagissait
pas, les impérialistes américains se sont enhardis.
La seule assurance donnée
d'ailleurs par les dirigeants soviétiques était
" qu'ils ne resteraient pas indifférents ".
Le président Johnson estima
que l'indifférence ou la non-indifférence de Moscou
ne ferait pour lui aucune différence.
Dès le mois de septembre,
il avait pris la décision de bombarder systématiquement
le Nord.
Peut-être parce qu'ils n'étaient
pas au courant de cette décision les révisionnistes
soviétiques et français ont salué comme
une victoire de la paix son succès aux élections
présidentielles.
Lorsqu'en mars 1965, les bombardements
du Vietnam du Nord devinrent quotidiens, " les militaires
et les politiciens soviétiques joignirent leurs voix pour
agiter le spectre de la guerre mondiale plutôt que de souligner
les capacités soviétiques d'exercer une pression
militaire locale " remarquait ironiquement un expert du
Pentagone, T.W. Wolfe, dans un exposé devant une sous-commission
de la Chambre des représentants (11 mars 1965).
La doctrine soviétique : capitulation totale ou destruction
totale
Selon la doctrine enseignée
dans les manuels de stratégie militaire en U.R.S.S., un
conflit local, dans lequel les deux plus grandes puissances mondiales
se trouveraient impliquées " dégénérerait
inévitablement en guerre thermo-nucléaire mondiale
". (Cf. Voiennaia Strategia, sous la direction du maréchal
Sokolovski, p. 299 de la traduction américaine The Rand
Corporation.)
Dès lors, on comprend pourquoi
l'U.R.S.S. n'a pas riposté aux bombardements de villes
vietnamiennes.
On pourrait se demander simplement
s'il existe une ligne dont le franchissement par les agresseurs
impérialistes américains entraînerait une
riposte soviétique.
Jusqu'en 1964, on pensait que cette
ligne entourait le camp socialiste tout entier.
Depuis, on peut croire raisonnablement
qu'elle n'englobe que l'U.R.S.S.
Une question surgit alors : si les
Américains bombardaient demain Odessa, pourquoi l'humanité
entière devrait-elle périr pour venger les habitants
d'Odessa ? Leur vie serait-elle plus précieuse que celle
des habitants de Dong Hoï ?
A cette question, il y a deux réponses
:
1° La vie des habitants d'Odessa
est effectivement plus précieuse, car ils sont Russes
et non Vietnamiens. Comme disait un journaliste soviétique,
" l'homme de la rue n'a que faire des dogmes subtils, il
pense : tant qu'il ne me tombe pas de bombes sur la tête,
ça va !" (France Nouvelle, 25-9-63).
Les dirigeants soviétiques
se sont depuis longtemps débarrassés du "
dogme subtil " de l'internationalisme prolétarien
et ne prendront jamais le moindre risque pour défendre
même un pays socialiste contre l'impérialisme.
2° II n'est pas vrai qu'un conflit
local opposant l'U.R.S.S. aux Etats-Unis dégénérerait
nécessairement en conflit thermo-nucléaire.
Cette thèse n'est mise en
avant que pour justifier la passivité de l'U.R.S.S. dont
le véritable motif est sa volonté de s'entendre
et de coopérer avec les Etats-Unis.
Trahir sans en avoir l'air
La défense de la paix passe par la résistance à
l'impérialisme. Le vrai problème est celui de savoir
si l'on veut lui résister et si l'on se tient prêt
à lui résister.
A chaque agression des Etats-Unis,
à chaque franchissement d'un degré de l'escalade
les dirigeants soviétiques ont été pris
au dépourvu.
Ni sur le plan matériel ni
sur le plan idéologique, ils ne s'étaient préparés
à y faire face. Comment le pourraient-ils si on considère
que depuis plus de dix ans les faits ont constamment démenti
leurs analyses ?
Celles-ci n'ont d'ailleurs pour
eux qu'une fonction apologétique.
Leur problème est : comment
coopérer avec les impérialistes tout en gardant
leur influence sur une partie au moins du mouvement communiste
international ?
Cette influence accroît leur
" pouvoir de marchandage " avec leurs " partenaires
" américains.
Elle leur est en outre nécessaire
pour rendre service à ces derniers.
Ils ont imaginé pour tromper
les peuples deux énormes duperies :
- les prétendus obstacles mis par la Chine au passage
sur son territoire
de l'aide soviétique au Vietnam ;
- l'unité d'action pour aider le Vietnam.
" Plus le mensonge est gros, plus il est efficace "
(Goebbels).
Examinons la première affirmation. Depuis Je mois de mars
1965, les hauts fonctionnaires soviétiques ont soufflé
aux correspondants occidentaux à Moscou l'information
selon laquelle la Chine s'opposerait au transit des armes expédiées
par l'U.R.S.S., alors qu'en fait la Chine fait parvenir tout
le matériel qu'elle reçoit d'urgence, en priorité
absolue, et gratuitement.
La presse révisionniste reproduisait
les dépêches des agences occidentales, datées
de Moscou, qui pourtant étaient contredites par les déclarations
conjointes soviéto-vietnamiennes selon lesquelles le programme
d'aide au Vietnam se déroulait comme prévu.
En janvier 1966 le gouvernement
chinois remit au gouvernement soviétique une note lui
demandant de démentir " les fausses rumeurs sur les
prétendus sabotages par la Chine de l'aide au Vietnam
du Nord ".
Moscou refusa de recevoir cette
note pour ne pas être obligé de répondre
dans un sens ou dans un autre.
En mars 1966, les dirigeants du
P.C.U.S. ont envoyé une lettre aux partis communistes
d'Europe orientale qui reprenait les mêmes accusations.
Cette lettre fut reproduite par
Die Welt et par Le Monde et n'a jamais été désavouée.
Enfin, le maréchal Malinovski,
dans un discours prononcé le 20 avril 1966 à Budapest,
eut le courage (ou le cynisme) de prendre la responsabilité
de ces calomnies.
Il reçut la riposte qu'il
méritait. Le 4 mai, un porte-parole chinois le qualifiait
de " menteur ", faits à l'appui.
Sans user d'expressions aussi virulentes,
le Premier ministre vietnamien Pham Van Dong remercia, dès
le 25 avril la Chine pour " son assistance efficace, ainsi
que pour son aide dévouée dans l'acheminement des
secours envoyés par l'Union soviétique et les autres
pays européens fraternels ".
Par la suite, les camarades vietnamiens
ont démenti à plusieurs reprises les allégations
calomnieuses mises en circulation par les renégats soviétiques.
C'est ainsi quelle 19 juin 1966,
l'agence vietnamienne d'information communiqua : " Récemment
un certain nombre d'agences occidentales ont propagé la
rumeur selon laquelle le matériel de l'aide militaire
de l'Union soviétique rencontre actuellement des difficultés
entravant son transit à travers la Chine [...] les susdites
informations ne sont qu'une fable inventée de toutes pièces,
suscitée par de mauvaises intentions de provocation. "
(Voir le texte complet, ainsi que la déclaration du général
Giap, dans Garde Rouge n° 2.)
Les révisionnistes, néanmoins,
continuent à répéter imperturbablement les
mêmes mensonges, conformément au précepte
: " Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque
chose. "
Un aveu
Ce qu'il faut retenir de cette affaire, ce n'est pas le caractère
ignoble des procédés auxquels a recours la clique
dégénérée à la tête
du P.C.U.S., mais l'aveu implicite qu'ils contiennent.
C'est la faute de la Chine si le
Vietnam reçoit une aide insuffisante, semblent dire les
révisionnistes.
C'est qu'en effet le Vietnam reçoit
une aide très inférieure aux possibilités
de l'U.R.S.S., aussi bien en quantité qu'en qualité.
Tandis que les impérialistes
font le maximum pour gagner la guerre, l'U.R.S.S. fait le minimum
nécessaire pour masquer sa collusion avec eux.
Washington lui sait même gré
de cette " aide " et proclame à toute occasion
que la guerre au Vietnam ne devrait pas empêcher le resserrement
de la coopération soviéto-américaine.
Une défense anti-aérienne périmée
Considérons la défense anti-aérienne.
Depuis 1962, les Soviétiques
affirment qu'ils possèdent des fusées antifusées.
Or il est mille fois plus difficile d'atteindre en vol une fusée
qu'un avion.
Aujourd'hui l'U.R.S.S. est en train
d'installer ces fusées autour de ses grandes villes.
Ces dispositifs sont tellement coûteux
que les Etats-Unis ont reculé devant la dépense,
et ont renoncé à les installer.
Donc les fusées anti-fusées
soviétiques ont une efficacité suffisante pour
justifier de tels sacrifices.
N'est-il pas étonnant de
constater que l'ensemble de la défense anti-aérienne
vietnamienne a rarement infligé aux pirates américains
des pertes excédant 1,5 % ?
C'est que les fusées fournies
par l'U.R.S.S. datent de 1958 et sont totalement périmées.
Selon les experts militaires français,
les fusées antiaériennes ordinaires, dont dispose
la France, sont capables d'abattre 80 % des avions assaillants.
Nous pouvons donc supposer raisonnablement
que les fusées soviétiques sont capables d'en abattre
au moins 60%, même si elles étaient servies par
un personnel vietnamien insuffisamment entraîné.
Cette proportion aurait été
encore plus élevée si l'U.R.S.S. avait formé
les servants avant les bombardements.
Dans ce cas, il est même certain
que ceux-ci n'auraient pas été lancés en
premier Heu.
La guerre froide : un malentendu
C'est encourager l'agression que
de ne pas se préparer à y résister.
Mais comment les dirigeants soviétiques
pourraient-ils empêcher les impérialistes de leur
ravir l'initiative, quand ils ont toujours considère la
guerre froide comme un malentendu que des tête-à-tête
entre hommes d'Etat suffiraient à dissiper ? (Voir l'esprit
de camp David, qui a longtemps hante la propagande révisionniste.)
Lorsque Mao dit : " Quel que
soit le moment où éclatera la guerre civile, nous
devons nous tenir prêts.
Pour le cas ou elle arriverait tôt,
mettons demain matin, nous devons aussi être prêts
", il semble énoncer un lieu commun analogue à
celui de Démosthène disant : " Ceux qui savent
faire la guerre précèdent les événements
au Heu de les suivre. " Certes, cette idée n'est
pas difficile à comprendre ; encore faut-il considérer
l'ennemi comme un ennemi.
Les dirigeants soviétiques
à l'abri de toute attaque contre leur territoire, grâce
à leur armement moderne, ne croient pas que leurs intérêts
nationaux soient par ailleurs toujours opposés à
ceux des Etats-Unis.
Ils évitent de donner au
Vietnam des moyens susceptibles de faire trop de mal aux Américains.
Cela compromettrait leur bonne entente
avec eux.
Même sur le plan quantitatif,
l'aide soviétique est ridiculement insuffisante, a Durant
l'année 1965, la Chine a transporté au Vietnam
quelque 43 000 tonnes de matériel soviétique "
déclara un porte-parole du ministère des Affaires
étrangères de Chine le 4 mai 1966.
Jean Baby (La Grande Controverse
sino-soviétique, p. 219), qui cite cette déclaration,
remarque: " A titre de comparaison, les Américains
ont envoyé 800 000 tonnes de matériel militaire
par mois, sans compter les bombes transportées par les
avions de la Septième Flotte. "
Le porte-parole chinois ajoutait
la précision suivante : K Pour le premier trimestre 1966,
l'U.R.S.S. a demandé à la Chine 1730 wagons pour
le transport de matériel militaire.
La Chine a donné son accord
et préparé les wagons ; toutefois les livraisons
effectuées n'ont représenté que 536 wagons.
" (Cité par Jean Baby, ibid.)
Les dirigeants soviétiques
aident les Etats-Unis à déplacer leurs forces d'Europe
en Asie en leur faisant concession sur concession sur les questions
de l'Allemagne et de Berlin-Ouest.
N'ont-ils pas renoncé à
signer un traité de paix séparé avec la
R.D.A. ?
Eux-mêmes ont déplacé
des troupes d'Europe centrale en Extrême-Orient. Conjointement
avec les impérialistes, ils contribuent à l'encerclement
de la Chine, base rouge des peuples révolutionnaires.
Coordination ou arrêt de
polémiques
Maintenant, les révisionnistes reprochent à la
Chine de ne pas coopérer avec les autres pays socialistes
pour coordonner l'aide au Vietnam.
Que signifie cette accusation ?
"La Chine fournit au peuple
vietnamien une aide que seules ses possibilités limitent
" selon Le Quotidien du Peuple du 14 juin 1965.
Les Soviétiques n'ont pas
osé faire une déclaration pareille.
Selon l'évaluation des experts
américains, la Chine fournirait une aide au moins égale
en valeur à celle de l'U.R.S.S. (quelque 500 millions
de dollars) bien que sa production industrielle soit quatre fois
moindre.
Nous avons vu que la Chine n'empêche
pas l'aide des autres pays socialistes de parvenir à destination.
A quoi donc servirait la "
coordination " que réclament à cor et à
cris les Soviétiques puisqu'elle n'accroîtrait ni
l'aide chinoise, ni la leur ?
Elle servirait uniquement à
obtenir de la Chine un satisfecit implicite concernant la politique
soviétique au Vietnam.
Ce ne serait ni plus ni moins que
l'arrêt des polémiques que demandent désespérément
les renégats du Kremlin depuis 1963, c'est-à-dire
depuis qu'ils ont eux-mêmes déclenché la
polémique publique contre les marxistes-léninistes.
Or, la lutte conséquente
contre l'impérialisme est inséparable de la lutte
contre le révisionnisme et l'opportunisme.
Cela est une position de principe
énoncée déjà par Lénine.
Un nouveau Tachkent
Les révisionnistes ne soutiennent
pas politiquement la lutte du peuple vietnamien. Ils proclament
son " droit à la paix ".
Mais ils ne proclament pas son droit
à une paix juste, fondée sur les quatre points
de la R.D.V.N. et les cinq points du F.N.L.
Ils mettent unilatéralement
l'accent sur les souffrances du peuple vietnamien, et sur le
danger de la guerre mondiale, mais passent sous silence le caractère
invincible de la guerre juste qu'il mène contre l'agresseur.
Ils qualifient le F.N.L. de "
représentant ", non de seul représentant authentique
du peuple vietnamien.
Ils présentent comme seule
condition de l'ouverture des négociations l'arrêt
des bombardements et l'engagement de la part des Américains
de retirer leurs troupes, et non le retrait préalable
de celles-ci exigé par les Vietnamiens.
Ils dénoncent du bout des
lèvres la supercherie des propositions de paix américaines
(tout en pratiquant en grand la diplomatie secrète avec
lui) mais se taisent sur les agissements de ses fidèles
commis, la clique Tito-Gandhi.
Ils préparent ainsi l'opinion
à un nouveau " Tachkent ", c'est-à-dire
à un accord fondé sur le maintien du statu quo
territorial et des lignes de démarcation (le dix-septième
parallèle !) ce qui livrerait le Sud-Vietnam à
la domination impérialiste, de même que l'accord
de Tachkent a livré le peuple du Cachemire à l'oppression
du chauvinisme indien.
Ils ne cachent même pas leurs
intentions.
En mars 1966, n'ont-ils pas publié
dans Les Temps nouveaux (n° 6) un article déclarant
que " deux voies s'offrent au monde, celle de Tachkent ou
celle du Vietnam ?
Lutte contre les agents de l'impérialisme
Si l'U.R.S.S. fournit au Vietnam une aide très insuffisante
et très limitée (de vieux stocks d'armes périmées)
c'est pour accumuler un capital politique afin de peser le moment
venu en faveur d'une solution qui offrirait selon l'expression
de Kossyguine " une porte de sortie aux Etats-Unis ".
Mais les impérialistes ne
cherchent pas une porte de sortie, ils veulent la victoire.
La porte de sortie que voudraient
leur offrir les révisionnistes correspond à leur
objectif fondamental : le maintien sous leur domination du Sud-Vietnam.
Comment pourrait-il y avoir de front
uni sur cette base ?
Consentir en outre à l'arrêt
de la polémique, ce serait désarmer idéologiquement
les peuples et les livrer à la pénétration
de l'idéologie bourgeoise et de son auxiliaire le révisionnisme.
Comme a dit le journal vietnamien
Tarn Viet Hoa (le 13 juillet 1966) " seuls sont de vrais
révolutionnaires, ceux qui combattent résolument
l'impérialisme américain, tandis que les révisionnistes
modernes sont parvenus à un compromis avec l'impérialisme
américain, et sont des renégats qui mettent des
bâtons dans les roues de la révolution ".
Pour conclure, les révisionnistes
n'ont pas de place dans un front uni contre l'impérialisme
américain pour la bonne raison qu'ils en sont les agents
au sein du mouvement ouvrier !
Comme disait Lénine :
" La lutte contre l'impérialisme,
si elle n'est pas indissolublement liée à la lutte
contre l'opportunisme, est une phase vide et mensongère
". (L'impérialisme, stade suprême du capitalisme.)
|